
Les guerres scolaires.
Situation de l'enseignement en 1830.
Après la révolution, provoquée par le mécontentement des Belges contre le régime constitutionnel établi par Guillaume Ier, toutes les mesures prises en faveur de l'enseignement sont supprimées, celui-ci est complètement désorganisé.
Deux partis sont alors représentés en Belgique : les Catholiques et les Libéraux.
- Le parti Catholique comprenait presque la totalité du peuple belge : la classe rurale, les milieux des artisans et des commerçants, les petits négociants, une grande fraction de la
bourgeoisie et de la noblesse.
- Le parti Libéral regroupait : des avocats, des professeurs, des magistrats, des notables riches, le haut négoce, la production manufacturière, et des entreprises aux mains des capitalistes.
La première loi organique du 30 août 1842- dite Loi Nothomb.

En 1842, un cabinet mixte, dirigé par Jean-Baptiste Nothomb, veut sortir de l'anarchie qui règne dans l'enseignement, et obtient des chambres le vote de la première loi organique de l'enseignement primaire.
- Chaque commune est obligée d'entretenir au moins une école primaire publique ou d' adopter une école confessionnelle.
- L'enseignement de la religion catholique considéré, comme inséparable de la morale, est obligatoire, sauf pour les élèves professant un autre culte (protestant, israélite). Cet enseignement religieux doit être donné par l'instituteur et inspecté par le clergé.
Réflexions de René le Frairot :
Les mesures prises par Guillaume 1er fondent ce qui serait une véritable école publique.
Après la révolution, le premier gouvernement belge est majoritairement catholique, il supprime, évidemment, toutes les lois hollandaises qu'il trouve beaucoup trop favorables aux laïques. Les curés et surtout les ordres religieux comme les Jésuites retrouvent dès lors la mainmise sur l'enseignement.
Essayant de faire un effort de conciliation, le ministre Jean-Baptiste Nothomb, fait voter la 1ère loi organique de l'enseignement.
Cette loi garde un caractère très confessionnel, la chambre la vote à l'unanimité moins trois voix, dont celle de Théodore Verhaegen fondateur de ULB.
Evidemment, elle ne met pas fin au mécontentement des libéraux partisans d'un enseignement officiel laïque, ceux-ci ne renoncent pas à évincer le clergé et ses partisans de l'Enseignement.
La Loi de 1879- Loi Van Humbeek-
Ou Loi de Malheur.

- Cette Loi impose l'obligation d'instituer une école primaire publique par commune.
- L'enseignement de la religion peut être donné par les prêtres, à l'école, mais seulement sur la demande des parents et en dehors des heures de classe.
- Le gouvernement nomme les inspecteurs, approuve les programmes et les livres scolaires.
- L'Etat se réserve le monopole de l'enseignement normal.
- Les instituteurs, nommés par les communes, doivent être porteur d'un certificat de l'enseignement normal.
- ...
- Cette loi centralisatrice et laïque déchaîne une âpre lutte entre laïques et catholiques.
- Les catholiques fondent une quantité d'écoles confessionnelles vers lesquelles émigrent, en moins de deux ans, 66% des élèves, et 1340 membres du personnel.
- Le clergé excommunie les défenseurs de l'enseignement officiel.
C'est le signal de la « guerre scolaire ».
Pour illustrer la violence de cette guerre, voici le texte de la prière récitée chaque dimanche, par le prêtre du haut de sa chaire de vérité.
« Il est donc vrai au nom de Dieu, que les ennemis de votre nom et les nôtres ont juré la perte des âmes rachetées au prix du sang du Christ.
Eteindre la foi dans le cœur des Belges et étouffer ce germe dans le cœur des enfants, livrer toute la jeunesse aux mains de maîtres, sinon athées, au moins indifférents, soustraire à ses regards le signe sacré de la Rédemption, interdire aux jeunes âmes la prière dans les écoles, écarter ou paralyser l'action du prêtre là où sa mission rend sa présence surtout nécessaire, tels sont les desseins qui se révèlent à nos yeux et qui nous plongent dans une profonde tristesse.
On veut Seigneur déraciner la Foi du Sol de la Patrie, ravir à la Belgique son glorieux titre de catholique, arracher à nos populations fidèles et laborieuses les consolations et espérances de la Religion.
Notre Seigneur, Vous ne le permettrez pas ! Notre Père qui êtes ....
Je vous salue Marie, mère...
Des écoles sans Dieu et des maîtres sans Foi, préservez-nous Seigneur !
Ainsi soit-il !
(Malines, le 31 janvier 1879, Victor-Auguste Cardinal Dechamps, archevêque de Malines)
Le cabinet Frère-Orban tient bon.
A mesure que le gouvernement crée des écoles officielles, la population des écoles libres croît en nombre. Le déficit de l'Etat augmente et se voit obligé d'établir de nouveaux impôts. Le Cabinet devient très impopulaire mais il tient bon.
Réflexions de René le Frairot :
Cette Loi Van Humbeek voulait chasser les curés hors de l'école et la
laïciser. Le cours de religion est supprimé, il peut toutefois être donné, mais seulement à la demande des parents et en dehors des heures de classe.
On comprend la réaction violente des catholiques et surtout de l'Eglise qui veut garder «l'éducation religieuse» dans les écoles.
Le clergé a une puissance énorme. Il s'est enrichi grâce aux nombreuses
donations et legs des catholiques. Dans nos campagnes, les curés s'octroient un pouvoir énorme et exercent des pressions morales sur les familles, ils contrôlent les actes de la population qui est restée profondément pieuse. Par leurs menaces de toutes sortes : excommunication, perte d'emploi, refus de l'absolution, conseils de divorce aux épouses, refus des sacrements,...ils influencent l'opinion public.
Dès lors, il ne faut pas s'étonner du départ de nombreux élèves et de certains membres du personnel vers les écoles catholiques et autres établissements religieux.
Cette épreuve de force entre l'Eglise et les laÏques perdurera jusqu'en 1959.
Mais les partisans de l'école laïque n'ont toujours pas renoncé à une véritable
Ecole Publique Laïque.
Peut-on encore y croire ?